Rapport de l’ONG The Sentry avec CNN
CNN en association avec The Sentry: 14 juin 2021 (New York, Washington DC et lieux non divulgués en Afrique centrale)
« Machine à piller et à tuer » Le groupe Wagner étroitement lié au Kremlin, commet des atrocités de masse sur des civils en Afrique centrale,
Cette enquête inédite décrit des meurtres et exécutions, des cas de torture, de pillage, d’enlèvements contre rançon et de viols collectifs : « Des civils pourchassés comme des animaux »
Une armée de mercenaires liée au Kremlin se livre à un carnage dans le but de contrôler des mines d’or et de diamants en République centrafricaine et renforcer l’influence russe en Afrique
CNN et The Sentry ont étroitement collaboré durant plusieurs mois dans le cadre d’une enquête confidentielle, recueillant des témoignages et des documents impliquant le Groupe Wagner, une société opaque de défense et de sécurité, opérant dans l’ombre et possédant des liens avec le Kremlin, dans une série d’atrocités de masse commises sur des civils en République centrafricaine.
Le rapport d’enquête diffusé aujourd’hui sur CNN et un article prochainement publié sur CNN.com présentent des éléments de preuve détaillés faisant état de massacres, d’exécutions extrajudiciaires, de cas de torture, de pillage, d’enlèvements pour rançon, d’incendies de villages et de viols collectifs. Cette enquête révèle également la manière dont l’armée privée de mercenaires du Groupe Wagner, en alliance avec des forces armées loyales au président de la République centrafricaine, Faustin-Archange Touadéra, déchaîne cette violence dans le but de prendre le contrôle et d’exploiter des zones riches en or, en diamants et en minéraux précieux au profit d’intérêts privés.
John Prendergast, cofondateur de The Sentry, déclare : déclare : « En République centrafricaine, le crime organisé transnational s’est emparé des institutions gouvernementales et a pris des communautés entières en otage. Il s’agit véritablement d’une machine à piller et à tuer servant les intérêts du président de la République centrafricaine et de ses alliés étrangers, en particulier l’armée privée connue sous le nom de Groupe Wagner, qui possède des liens avec le Kremlin et qui s’approprie les réserves d’or, de diamants et d’autres minéraux du pays. Ce nouveau mode de pillage très lucratif constitue une menace grandissante, semant la mort et la dévastation, et mettant en danger la paix et la sécurité non seulement en République centrafricaine, mais également dans diverses autres zones sensibles de par le monde. Des mesures urgentes sont requises de la part de la communauté internationale, y compris des sanctions financières fortes devant être appliquées par les gouvernements et les institutions financières, afin de mettre fin à cette hémorragie en République centrafricaine et ailleurs. »
Nathalia Dukhan, enquêtrice senior à The Sentry, déclare: « Nous sommes témoins et recueillons des preuves sur une souffrance humaine sans précédent en République centrafricaine, où des civils sont actuellement pourchassés comme des animaux. Depuis le mois de décembre, les forces armées de Centrafrique et les mercenaires étrangers recrutés par le Groupe Wagner ont orchestré des opérations militaires brutales, motivées par la cupidité. En souhaitant éliminer les factions rebelles qu’elles considèrent hostiles aux intérêts russes sur des territoires riches en ressources naturelles, les forces armées nationales et leurs alliés du Groupe Wagner s’impliquent dans des actes à grande échelle et systématiques de torture, des disparitions forcées, des exécutions extrajudiciaires et des massacres, ainsi que des cas de pillage, d’enlèvements pour rançon et de viols collectifs. En unissant leurs efforts, les acteurs internationaux et régionaux peuvent faire entendre leurs voix et prendre des mesures coordonnées pour venir en aide à une population qui se voit décimée par cette guerre livrée au nom de l’avidité d’un pouvoir corrompu. »
Le Groupe Wagner ainsi que les entités et les individus y-étant associés font actuellement l’objet de désignations à titre de sanctions par le Bureau de contrôle des avoirs étrangers (OFAC) du département du Trésor des États-Unis.
RECOMMANDATIONS URGENTES :
En plus du rapport d’enquête, The Sentry a publié une série de recommandations adressée aux gouvernements et aux institutions financières internationales dans le but de contribuer à l’arrêt des atrocités, des violations des droits de l’homme, de la dévastation et des graves souffrances humaines perpétrées par le Groupe Wagner et des forces armées du régime de Touadéra.
- Les États-Unis devraient réviser leurs désignations de sanctions en ce qui concerne les sociétés de sécurité privées (y compris le réseau de sociétés liées au Groupe Wagner) et les individus actifs en République centrafricaine. Le Gouvernement américain devrait procéder à des désignations de sanctions ciblées additionnelles à l’encontre des réseaux de dirigeants, de membres, d’entités associées et de facilitateurs, en particulier ceux qui rendent possible les flux financiers illicites hors de la République centrafricaine. Ce processus de désignations devrait être réalisé en coordination avec les partenaires internationaux des États-Unis et sous l’égide des autorités de sanction appropriées, y compris la loi Magnitsky, les programmes pays et ceux visant à sanctionner les organisations impliquées dans le crime organisé transnational.
- Le Royaume-Uni et l’Union européenne devraient, en coordination avec leurs partenaires internationaux, faire usage de leurs régimes de sanctions contre les violations des droits de l’homme dans le monde et leurs programmes nationaux, pour infliger des sanctions ciblées aux réseaux de sociétés de sécurité privées qui se livrent à des violations des droits de l’homme en République centrafricaine, et en particulier le Groupe Wagner, ses dirigeants, membres, entités associées et facilitateurs. Les sanctions des USA, de l’UE et du RU devraient être étroitement coordonnées pour garantir un impact maximal.
- La communauté internationale, menée par l’UE, les USA et le RU, devrait mettre en œuvre des mesures coordonnées pour cesser leur soutien politique inconditionnel au régime du président Touadéra, lequel a facilité la prise en otage de l’État centrafricain par des réseaux issus du crime organisé et des groupes armés, à moins que des mesures urgentes soient prises pour rétablir la paix, la gouvernance et la transparence à long terme. À cette fin, l’UE et les USA devraient interrompre toute coopération militaire avec le gouvernement de la République centrafricaine. Les USA et l’UE, ainsi que les institutions financières internationales telles que le Fonds monétaire international et la Banque mondiale devraient collectivement suspendre toute aide financière directe non-humanitaire au gouvernement de la République centrafricaine. Des standards en matière de gouvernance, de démocratie et de droits de l’homme devraient être clairement notifiés aux autorités centrafricaines en tant que conditions préalables à toute aide ultérieure.
- La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) devrait, dans le cadre de son mandat, prendre des mesures de manière plus active et transparente afin de répondre aux menaces sérieuses et crédibles pesant sur la population civile, documenter les violations graves au droit humanitaire international et au droit pénal international, et lancer une enquête immédiate sur les allégations fournies dans ce rapport.
- Le Groupe de travail des Nations Unies sur l’utilisation de mercenaires devrait se servir de sa récente déclaration concernant les activités présumées du Groupe Wagner comme fondation pour lancer une enquête approfondie sur les allégations de violations graves des droits de l’homme et de crimes internationaux qui sont formulées par cette enquête. Le Groupe de travail devrait également convaincre l’UE, les USA et les autres gouvernements donateurs d’exhorter le gouvernement de la République centrafricaine à mettre fin à l’utilisation de mercenaires dans le conflit qui fait rage dans le pays.
- Les banques et les institutions financières devraient appliquer leur devoir de vigilance renforcée auprès des individus et entités qui font partie de leurs clients et possèdent des liens avec des sociétés de sécurité privées actives en République centrafricaine, étant donné qu’ils pourraient représenter un risque plus élevé d’activités financières illicites telles que le non-respect des sanctions, le blanchiment d’argent et la corruption. Elles devraient également mettre à jour leurs procédés de vigilance renforcée de manière régulière. Les banques et les institutions financières devraient également prendre des mesures visant à identifier les comptes bancaires sous contrôle ou étant la propriété bénéficiaire d’individus ou d’entités possédant des liens avec le Groupe Wagner, et geler ces comptes dans la mesure requise par la législation ou les politiques bancaires en vigueur.